On l’a souvent réduit à une parenthèse. Un passage obligé. Un moment un peu flou entre la jeunesse et la vraie vie. Mais ceux qui l’ont vécu savent que le service militaire avait un sens.
On ne forge pas des citoyens avec des slogans. On les forme par le vécu.
À quoi servait-il vraiment ?
À faire une armée ? Oui, mais pas seulement.
Le service militaire servait à produire du lien entre les classes sociales.
Il créait une expérience commune, partagée par des jeunes de tous horizons.
Un gars de banlieue, un fils d’agriculteur, un bachelier parisien : même uniforme, même réveil, mêmes corvées.
Et cette égalité-là, elle était vécue.
Elle n’était pas déclarée dans un texte.
Elle se construisait dans les douches communes, dans les marches forcées, dans les tensions aussi — mais des tensions contenues dans un cadre.
Il servait aussi à rappeler que la liberté s’accompagne d’une responsabilité.
Qu’on ne vit pas seulement pour soi, mais aussi pour quelque chose qui nous dépasse : le pays, la République, une certaine idée de ce qu’on doit être ensemble.
Aujourd’hui, ce lien s’est distendu.
Chacun vit dans sa sphère, dans son entre-soi.
Et beaucoup de jeunes ne croisent plus personne en dehors de leur quartier, de leur école, ou de leur réseau.
Alors oui, le service militaire servait à ça.
À faire exister une République concrète, dans les corps et dans les esprits.
Et c’est peut-être ce qu’on devrait retrouver aujourd’hui, sous une autre forme, mais avec la même exigence.
Extrait de l’ouvrage Faut-il rétablir le service national en France ?
Auteur : Vincent BOCA – sur Amazon Kindle